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Je me casse de chez vous !
Vivre chez ses parents à 40 ans peut sembler banal, voire évident dans notre société et tout naturellement fatal quand on est née dans le sexe faible. Car au Maroc, tant que tu n’es pas casée, tu es traitée en être jeune, irresponsable et potentielle source à problèmes, ben voyons !
Pas étonnant en un sens. Une société à la sexualité refoulée ne peut qu’associer liberté à débauche. Je me suis longtemps demandé, comme tout le monde je suppose, pour quelle raison l’homme échappait à ces restrictions. Je suis partie dans toute une analyse à la noix que j’ai dissoute dans un bol de hrira un jour de grosse déprime. Mais ça, c’est une autre histoire.
En parlant de restrictions, je pense en ce moment à la liberté de vivre seule, au bled. J’ai passé la nuit à imaginer la scène où je leur dirai que je vivrai seule. Ma mère me regardera avec dédain comme si j’avais dit une énième bêtise qui ne ferait que renforcer le manque d’estime qu’elle a pour moi.
Parce que le manque d’estime est quasi indissociable du statut de vieille célibataire : vieille fille c’est certainement une invention féminine, seule une femme peut et sait blesser une autre femme !
Passés les « Meskina » et les « llah ydir li fiha lkhir », on se retourne pour se délecter du petit confort de sa petite vie de famille (même si pas confortable pour un sou !) en remerciant le tout puissant de nous avoir évité cette poisse. Non pas poisse… ce n’est même pas pris pour une malédiction mais pour une incompétence, un échec, une incapacité à attirer, à séduire, à donner envie à un homme de faire sa vie avec toi. Même si c’est toi qui refuse l’homme, tu seras toujours la bête en attente d’un maître. Et tu finis par devenir une vieille bête errante parce que personne n’adopte de vieux chiens.
Misanthrope comme je peux être, je me fous pas mal des autres. Je ne les fréquente pas. Mais lire ça sur les visages de ma mère et mon père me détruit chaque jour un peu plus. Mon jeune, très jeune frère, marié il y a déjà 5 ans, me cherche en permanence un parti prenable parmi ses ouvriers et ses subalternes. Un gars de son, ou de mon niveau c’est juste impensable à mon âge. Seule ma petite sœur, chou à la crème, trouve chaque jour un nouvel argument pour me dégoûter de la vie de couple. A chaque fois que je lui dis que je sors rencontrer quelqu’un, elle saute de joie sans s’en apercevoir.
Vieille fille qui ne bosse pas, c’est le comble. Pourtant, j’ai une formation littéraire assez bonne. Je ne sais pas, je peux rédiger des idioties comme ça à longueur de journée, par exemple… ou taper sur une machine… ou préparer des cafés. Mon chômage ne m’aide pas. Je suis non seulement sans foyer mais également sans revenu. Je suis bonne à tout faire dans les maisons de mes parents, mes oncles et tantes et de mon frère. ma petite soeur n’arrête pas de se révolter contre la tyrannie générale et contre mon exploitation, mais je ne parle pas. Je laisse ma mère et mes tantes sortir des arguments genre : « laisse-la tranquille, on fait tout pour l’occuper la pauvre » ou encore « quand elle aura son propre foyer, on lui rendra tout ce qu’elle fait pour nous »… et je ne parle même pas, au grand désespoir de ma soeur.
Mais faire la boniche me blesserait nettement moins si l’on ne me considérait pas comme une invalide, une attardée mentale qu’il faut suivre et réprimander comme une enfant en permanence. Je suis le souffre-douleur des parents qui se prennent la tête dans des chocs de titans et se rabattent sur le premier fruit d’une regrettable union. Quand ils se réconcilient, ils se retrouvent dans leur chambre les vieux parents, ignorant les séquelles sur mon psychique décimé.
Je suis la représentante de la sale progéniture, quand mon frère ou ma sœur contrarie les parents. Je suis une piètre consolation quand ils leurs manquent.
Je suis le générateur de bêtises qu’on doit absolument taire lors des discussions animées, quand je ne suis pas là, on m’appelle, on me pose des questions et m’invite à parler pour me casser. Quand je ne parle pas, on m’attribue des suppositions de réponses parfaitement idiotes et on se marre en ma présence.
Je suis le clown qui doit poursuivre les enfants partout pendant que leurs parents (même plus jeunes que moi) parlent de choses sérieuses : leurs vies, leurs boulots, leurs soucis… j’ai de l’arthrose à 40 ans, j’ai un ongle incarné qui me fout un mal de chien à chaque fois que je marche, mais pas le courage de demander à qui que ce soit de me l’opérer. Courir après les enfants fait partie des corvées monumentales de la semaine. Je dors toujours plus tôt que la normale.
Je suis l’agenda électronique qui doit se rappeler de tout mais qui ne fonctionne même pas bien.
Je suis la honte à cacher quand des amies de ma mère viennent faire les ragots. Ça va certainement parler de mariage et de vieilles-filles.
Quand je leur dirai que je partirai, ils vont crier au scandale, à l’ingratitude, à la honte ! Une « fille » ne vit seule que parce qu’elle veut batifoler… quand ils ont pas cette idée tordue, ils pensent d’elle qu’elle est fille indigne qui lâche ses vieux parents après tout ce qu’ils ont fait pour elle. Ils feront tout pour étrangler l’idée dans son berceau, ignorant qu’elle a déjà pris des dimensions adultes. Je ne peux pas le leur annoncer avant d’avoir trouvé où me nicher.
Je ne veux pas leur expliquer que ça me mine l’existence d’entendre mes parents batifoler le soir à leurs sursauts de libido et me sentir coupable d’être là comme une mineure après l’âge. Je ne veux pas leur dire que ça m’embête de ressentir l’envie de me faire étreindre par quelqu’un dans la solitude de ma nuit. Je ne veux pas leur dire que j’en ai assez des pornos muets et d’étouffer mes gémissements quand je me touche dans la chambre jouxtant la leur. Pauvre de moi qui n’aie connu de modèle que l’extra-large de Rocco & co.
Aucun homme célibataire ne ressentirait cette gêne en vivant avec sa famille, car en plus d’avoir le service digne d’un hôtel 5*, tout le monde s’en écarterait logiquement pour qu’il puisse se sentir à l’aise, personne ne programmerait son existence en fonction de sa présence et ses services, parce qu’un homme, un vrai, a des occupations, des intérêts et des tâches importantes, y compris celle de sortir à la chasse avec ses potes autour d’une bière.
Je trouverai l’argent pour me louer 8m³ quelque part. Et je m’en irai.
Je parle au futur, pour garder vivant cet espoir, en ultime porte de sortie possible. Le conditionnel me déprimerait davantage.
Un jour, je m’en irai.
Par Samira Benbrahim
Tu es dure avec toi même Samira 🙁 , ne te rabaisse pas ainsi en les laissant te rabaisser, révolte toi, tu as besoin de leur faire comprendre que tu n’as pas besoin d’homme qui définirait ce que tu es ou ce que tu n’es pas… ton billet m’a vraiment touchée, tu écris magnifiquement bien. Je te souhaite beaucoup de courage pour pouvoir sortir de la maison de tes parents qui me semble être un véritable enfer pour toi… et je te souhaite aussi de trouver du travail le plus rapidement possible pour que tu ne sois plus dépendante d’eux.. Bon courage
Chère Samira, je te prie de m’envoyer ton cv, tu écris bien, parles bien, mais tu ne sembles pas trop faire d’efforts pour changer les choses. Je ferai de mon possible pour te trouver un travail. Ta famille t’aime c’est sûr, tu déprimes c’est normal. Courage, nous somes toutes passées par là. Attends toi à un tsunami le jour où tu décideras de vivre seule. Grand combat ! bises
Courage chère soeur!! Un jour une collègue m’a dit, quand je songeais aussi à quitter la maison de mes parents:
‘Nos peurs des conséquences si on opte pour un choix, sont parfois démesurées, par contre si l’on choisit de ne rien faire, là on pourra le regretter à vie ». Le risque dans ce cas serait une éventuelle rupture avec tes parents, mais sache chère soeur qu’une éventuelle rupture ne serait que provisoire. L’amour des parents ne doit pas être défini par le critère d’obéissance, par aucun autre critère d’ailleurs, on nous aime tout simplement. Sinon, sinon tant pis, tu fais passer ta vie d’abord, tes besoins, et s’ils n’ont pas su les écouter et les comprendre, alors ce n’est pas la fin du monde. Tu te forgeras une raison pour continuer à vivre sans être hantée par la culpabilité de leur avoir fait du mal. Et toi qui a su voir ta souffrance?
Courage encore!! Je te souhaite aussi de trouver du travail et un logement, les deux indispensables pour une vie digne, l’éducation tu l’as eu, ne perds pas la santé, et retrouve le sourire 🙂
NB: J’ignore si je peux t’aider, écris moi au cas où à mon adresse: aida.kheireddine@gmail.com
Trouves du boulot,n’importe lequel, loues ton 8m et fuis!!!!!! Coupe le cordon et vis ta vie!
Chère Samira, Ton histoire dans l’ensemble peut ressembler à des milliers d’histoires de jeunes femmes marocaines. Au Maroc, on fait tout pour tuer ‘individu et surtout quand il s’agit d’une femme. La vie est courte et il faut se débarrasser de tout ce qui nous l’empoisonne. Stp trouve des ami e s, sorts, travailles, voyage et si tu te sens le besoin d’être libre et indépendante fait tout pour cela. C’est vrai quand on est fille et on pense un jour de vivre seule, on devient angoissée par l’idée de blesser les parents, marquer une grande déchirure, ou la rupture, mais ils finiront par accepter. Tes parents vivent leur vie, tu dois vivre la tienne !
Mais tu ne Fais rien pour changer ta vie! Prepares ton CV et take Off!!! Wake up… YES YOU CAN!
Je suis toujours étonné et les « bras m’en tombent » quand je vois la clairvoyance, l’intelligence et les capacités des femmes marocaines qui, bien que nombreuses, continuent à se soumettre aux angoisses d’esprits limités qui n’ont rien à proposer, sinon à rabâcher compulsivement que la liberté conduit à la débauche … un mode de pensée à contre-courant des aspirations profondes d’une partie grandissante de l’humanité … oui, comme Samira, les « bras m’en tombent » …
Sors, rencontre les autres, vas te promener, tombes amoureuse, fais l’amour, vis !
La famille est un carcan aussi rassurant que dangereux et s’y complaire peut être tellement agréable pour ne pas se rencontrer. Tu as ta part de responsabilité dans ton malheur. Les autres sont très cité dans ton récit, mais toi ? TOI ? Ce n’est pas une attaque, je ne me permettrait pas, on fait tous comme on peut, mais c’est ce que je ressens en te lisant. On dirait que tu t’es aussi laissé tombé.
Bon courage et plein d’espoir pour toi.
Chère Samira,
Prends ton courage à deux mains, trouve un travail et ton 8m2 et quitte cette prison où tu es mnt. Il y aura des tensions au début, mais ta famille finira par l’accepter.
Tu es intelligente, tu as l’éducation, je sens aussi une grande volonté, tu sais ce que tu veux…alors fonce! Bats toi pour ton bonheur et ton droit de vivre car seule toi tu peux le faire. Ne te laisse pas abattre ni décourager. Et puis tu ne seras pas seule dans ta lutte, nous sommes toutes derrière toi.
Mais BOUGE !!! Et garde le sourire.
Très bon courage à toi.
Fort, poignant, douloureux…
Courage Samira. Courage.
Samira, rien ne t’oblige à rester avec tes parents sauf le manque de travail c’est pourquoi je te conseille de faire ton possible pour t’en trouver un le plus vite possible et celà n’est possible que si tu bouge.
Courage et dis toi bien que nous sommes toutes avec toi.
Samira, arrête de te poser des questions et d’essayer de trouver des causes à ta situation, tu en es l’unique responsable!
Désolée si je suis directe, mais je te parle en connaissance de cause, je suis femme marocaine comme toi, cela fait 7ans que j’ai quitté le foyer familial avec mon diplôme et quelques affaires comme bagages , j’en ai 30 dans quelques mois, et il ne m’est encore jamais arrivé de le regretter, ne serait ce qu’un instant,
Aujourd’hui, j’ai une très bonne situation professionnelle, un mari que j’aime et qui me témoigne tout le respect et l’amour dont j’ai besoin, un chez moi très douillet dont je ne suis pas moins fière, je vois ma famille tous les mois (ma mère et frères et soeur) et je suis HEUREUSE, j’ai perdu quelques amis en cours de route, j’ai coupé définitivement les ponts avec plusieurs membres de ma famille et avec mon père depuis (mais les raisons sont beaucoup plus anciennes et plus complexes),c’est pas grave! Je ne m’en sens que plus allégée!
je ne vais pas te mentir, c’est dur au début, très dur même, trouver un logement pour une femme ici relève des travaux forcés, entre les proprios qui te demandent si tu reçois des hommes chez toi, ou ceux qui te disent, avec un air de mépris: on ne loue pas aux femmes seules!et j’en passe.
Mais quel bonheur, quand la situation est plus stable, qu’on est indépendante financièrement et affectivement (car oui, vivre chez ses parents, c’est aussi une forme de dépendance affective), de savourer son statut de femme libre et indépendante, ça en vaut vraiment la peine!
Alors prends ton courage à 2 mains, et mets toi une deadline, dis toi qu’avant la fin du mois prochain, tu dois avoir quitté le foyer familial, crois moi, il n’en ressortira que des bonnes choses pour toi.
Surtout si tu as besoin de conseils pour démarrer ta nouvelle vie, n’hésite surtout pas à me contacter, je pourrais peut être t’éviter certaines erreurs que j’ai commises, et te donner quelques pistes pour Re-commencer ta vie en toute sérénité.
evilfee@yahoo.fr
Bonjour Samira,
Très touchée par ton récit, si tu habites Rabat, tu sais taper sur une machine et capable d’écrire ce genre d’idioties comme tu dis à longueur de journée, je t’embauche sur le champ avec un très bon salaire.
Offre sérieuse, écris moi et tu verras.
kalaloubouchra@menara.ma
La plume qui écrit ainsi est loin d’être celle d’un clown! Tu es une femme formidable, ne passes pas à côté de ton potentiel… Souviens-toi qu’on n’a que la vie que l’on choisit: Fixes toi des objectifs, définis les moyens dont tu auras besoin pour les atteindre et fonces! Le secret du bonheur, il n’y en a pas; c’est juste cette recette vieille comme le monde. Allez Samira, regardes combien de personnes tu as ému, un vrai fan club! Alors oui, si tu as besoin de parler, d’encouragement, d’écoute sans jugement, bref d’une amie, comptes moi parmi tes autres fans! 🙂 Courage,tu vas y arriver il suffit juste d’y croire et de se retrousser les manches…
meriemaida_r@yahoo.com
écrire des commentaires de soutien OK mais personne ne pense à analyse le problème de fond derrière cette histoire, une femme n’a pas d’existence en dehors du foyer familial que ce soit sous la tutelle de son père ou celle de son mari.
En te lisant Samira, j’ai eu les larmes aux yeux. Je ne suis pas dans ton cas. Moi j’ai eu la chance d’avoir des parents qui m’ont couvée juste assez pour me faire pousser des plumes et m’ont jetée ensuite dans les airs pour prendre mon envol. Je suis reconnaissante à dieu de les avoir. Mais j’étais loin de croire que la situation contraire pouvait être aussi pénible. Je suis sure que tu es une jeune femme (oui très jeune) très charmante et agréable, même muette. Tu es d’une telle sensibilité que tu as su exprimer ton malaise sans peine aucune. Preuve en est que je me suis surprise en train de gémir, au beau milieu de ton texte.
J’ai lu les commentaires qui t’invitaient à une prise de contact, mais malheureusement tu n’as pas répondu (non?). Je ne sais pas ce qui t’en empêche, mais sache qu’il y a toujours une issue dans la vie. Dieu ne crée la porte que pour l’ouvrir alors ne t’emprisonne pas dans ta culpabilité. Tes parents te pardonneront, mais commence d’abord par t’en éloigner assez pour leur pardonner toi même… Et sache que ceux qui sont heureux ne le méritent pas plus que toi!!!
Toute ma sympathie Samira.
PS : tu écris divinement bien.